J’ai eu l’occasion de faire une interview pour le journal Libération pour un article sur l’anxiété liée à la rentrée scolaire. ✨Il est important en tant que psychologue de diffuser au maximum nos informations !!
L’interview ci-dessous avec Iris Shimizu, journaliste :
Angoisse de la rentrée : «Quel que soit le niveau scolaire de l’enfant, les parents peuvent lui parler de leur propre expérience pour le rassurer»
Dans moins d’une semaine, des millions d’enfants feront leur rentrée des classes. Cette période, synonyme de nombreux chamboulements, peut générer un stress important. La psychologue Laurence Roque-Barret donne quelques outils pour apaiser l’angoisse.
Les mains sont tremblantes, le corps est raide et les regards fuyants. On n’ose pas parler à son camarade de classe, ni même lever la main pour prendre la parole. A la place, on préfère écouter le professeur nous présenter la nouvelle année. Dans moins d’une semaine – le lundi 2 septembre – des millions d’élèves feront leur rentrée des classes en France et pour nombre d’entre eux, le moment rimera avec anxiété.
D’après un rapport de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) publié en 2014, l’anxiété générée par l’idée de retourner à l’école touche un enfant sur cinq. Dans 1 % à 2 % des cas, cette angoisse peut se transformer en phobie scolaire, selon l’Inserm. Et sur le chemin de l’école, les enfants ne sont pas les seuls à claquer des genoux : 87 % des parents se disent stressés par la rentrée, d’après une étude des entreprises GoStudent et Kantar en 2022 et, pour 7 % d’entre eux, très stressés. Pourtant, cette étape peut aussi se passer sans drame. Pour faire redescendre la tension, Libé a recueilli les conseils de Laurence Roque-Barret, psychologue pour enfants et adolescents.
Alors que la rentrée approche, est-il commun de ressentir une peur à l’idée d’entamer une nouvelle année ?
Il est tout à fait normal que les enfants ressentent de l’anxiété à l’approche de la rentrée. Ces angoisses sont particulièrement présentes lorsque l’enfant rentre en petite section, en CP ou en sixième. Cela s’explique par la peur de l’inconnu : pour ceux qui intègrent la petite section, ils auront à découvrir un univers entier. Symboliquement, cette étape est forte car elle marque leur entrée dans la communauté scolaire. Pour les CP, l’anxiété est souvent liée à l’apprentissage et à la pression sociale autour de ce sujet. Quant à la sixième, l’angoisse peut être en lien avec les relations : les enfants ne sont pas sûrs de se retrouver avec leurs camarades.
Cette anxiété, il faut l’accepter et en faire quelque chose : pour ceux qui rentrent en petite section, les parents peuvent leur faire visiter l’école en juin ou les amener devant l’établissement quelques jours avant la rentrée afin qu’ils puissent se familiariser avec l’endroit qui va les accueillir. Puis, quel que soit le niveau scolaire de l’enfant, les parents peuvent lui parler de leur propre expérience pour le rassurer. L’idée est que le parent soit à son écoute, entreprenne le dialogue et valide ses émotions : cette démarche va faire automatiquement faire baisser la pression et l’anxiété.
Quels gestes peuvent adopter les élèves pour soulager cette angoisse ?
Il faut anticiper cette rentrée et reprendre tranquillement ses habitudes pour ne pas basculer du jour au lendemain dans quelque chose de très structuré et formalisé qui peut être trop contrasté par rapport aux vacances. Quinze jours à une semaine avant le début de l’école, il faut reprendre une routine avec un rythme plus régulier – des horaires de repas fixes, un horaire de lever et de coucher – que celui des vacances. Ensuite, je recommande de lâcher les écrans et aux plus grands, de se remettre à la lecture. Les parents peuvent également impliquer l’enfant dans l’achat des fournitures scolaires pour qu’il soit investi et qu’il prépare lui-même sa rentrée.
Quant au matin de la rentrée scolaire, je conseille aux enfants de se lever un peu plus tôt que d’habitude pour prendre le temps de se préparer et arriver à l’école un peu en avance. Sur le chemin de l’école, les parents auront ainsi le temps d’échanger avec leur enfant en validant ses émotions et en lui expliquant le déroulement de sa journée pour qu’il puisse l’anticiper et se la représenter.
A quel moment les parents doivent-ils s’inquiéter ?
S’il est normal d’avoir de l’anxiété lors de la rentrée, cela ne doit pas affecter la vie de l’enfant. Il y a des signaux à repérer comme un sommeil perturbé, des refus alimentaires ou encore le pipi au lit. Pour les enfants de petite section, si cela perdure après un ou deux mois, il vaut mieux consulter un psychologue. Plus vite le problème est pris en charge, plus vite il est soigné. Quant aux plus grands, cette anxiété peut être liée à quelque chose de plus complexe – pression, difficulté à se faire des amis. Pour eux, il ne faut pas hésiter à consulter rapidement.
En cas d’angoisses paralysantes, je recommande des exercices de respiration, par exemple le matin, juste avant d’arriver à l’école. Les parents peuvent également en parler au professeur, avec l’accord de l’enfant, pour que l’enseignant puisse lui être attentif.
Les parents ont donc un rôle capital dans les émotions des enfants lors de la rentrée...
J’ai été psychologue en milieu scolaire pendant treize ans. Lors de chaque rentrée, je me souviens voir des parents angoissés qui transmettaient leur anxiété à leurs enfants. Ils avaient du mal à partir et certains pleuraient. Si le professeur fermait la porte et qu’il y avait des baies vitrées, les parents restaient derrière la vitre pour voir leur enfant le plus longtemps possible. Or, s’il est important de prendre le temps d’expliquer à son enfant qu’on s’en va, il ne faut pas s’éterniser en termes de présence et d’au revoir. Si le parent reste, l’enfant va comprendre que quelque chose ne va pas.
En petite section, l’anxiété des parents est souvent liée à l’angoisse de la séparation ou encore, avec le fait de confier son enfant à un enseignant. C’est normal. Il y a une forme de nostalgie qui peut faire peur dans le fait de voir son enfant grandir.
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